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20 juin 2011

Pourquoi, ce matin, me choisirais-je ?

 
Que ne puis-je retarder d’être moi, paresser dans l’état universel ?


Pourquoi, ce matin, me choisirais-je ? Qu’est-ce qui m’oblige à reprendre mes biens et mes maux ?
Si je laissais mon nom, mes vérités, mes coutumes et mes chaînes comme rêves de la nuit, comme celui qui veut disparaître et faire peau neuve, abandonne soigneusement au bord de la mer, ses vêtements et ses papiers ?

N’est-ce point à présent la leçon des rêves et l’exhortation du réveil ? Et le matin d’été, le matin, n’est-il le moment et le conseil impérieux de ne point ressembler à soi-même ?


Le sommeil a brouillé le jeu, battu les cartes ; et les songes ont tout mêlé, tout remis en question…

Au réveil il y a un temps de naissance, une naissance de toutes choses avant que quelqu’une n’ait lieu. Il y a une nudité avant que l’on se revêtisse.


Paul Valéry  "Tel Quel"



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