Que
ne puis-je retarder d’être moi, paresser dans l’état universel
?
Pourquoi,
ce matin, me choisirais-je ? Qu’est-ce qui m’oblige à reprendre
mes biens et mes maux ?
Si je
laissais mon nom, mes vérités, mes coutumes et mes chaînes comme
rêves de la nuit, comme celui qui veut disparaître et faire peau
neuve, abandonne soigneusement au bord de la mer, ses vêtements et
ses papiers ?
N’est-ce
point à présent la leçon des rêves et l’exhortation du réveil
? Et le matin d’été, le matin, n’est-il le moment et le conseil
impérieux de ne point ressembler à soi-même ?
Le
sommeil a brouillé le jeu, battu les cartes ; et les songes ont tout
mêlé, tout remis en question…
Au
réveil il y a un temps de naissance, une naissance de toutes choses
avant que quelqu’une n’ait lieu. Il y a une nudité avant que
l’on se revêtisse.
Paul
Valéry "Tel
Quel"
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire